Un 8° Abricot d’or goûteux à Erevan!
Le 8ème Festival international du film d’Erévan, s’est tenu en Arménie du 11 au 17 juillet. Cette manifestation est appelée Abricot d’or, en hommage au fruit si goûteux dont c’est la pleine saison en ce début d’été.
Le Festival, c’est l’occasion unique de voir en Arménie le meilleur du cinéma contemporain. The Tree of Life de Terence Malick, Copie conforme d’Abbas Kiarostami, Melancholia de Lars Von Trier, Pina de Wim Wenders, Le Cheval de Turin de Bela Tar ou Il était une fois en Anatolie de Nuri Bilge Ceylan ont été projeté devant un public très jeune et avide de cinéma qui a envahit les salles de projection du Palais Moscou. Il est vrai qu’Erévan ne compte plus qu’une seule salle commerciale. Bela Tar, Abbas Kiarostami et Nuri Bilge Ceylan sont venus présenter leurs films et répondre aux nombreuses questions du public. Dans la compétition internationale, Une Séparation d’Asghar Faradi qui a remporté la récompense la plus prestigieuse, l’Abricot d’or. Le réalisateur iranien n’a pas pu, pour des raisons politiques, venir recevoir ce prix.
La sélection arménienne a permis aux nombreux participants de découvrir la richesse artistique de ce pays dont la culture est millénaire et l’histoire dramatique. Le génocide de 1915 et les relations douloureuses avec la Turquie sont souvent au cœur des documentaires et donnent aux films de fiction une intensité particulière.
Une rétrospective des films de Dmitry Kesayants (1931/2001) a permis de découvrir ses films les plus anciens, dont Le Maître et le serviteur (1962) ou Le Roi Chakh-Chakh (1969) et de voir que la critique du régime soviétique peut s’exprimer sous forme de fables en apparence inoffensives.
Mais le film du réalisateur américain Brandon King, Here, entièrement tourné en Arménie, a dérouté les spectateurs. C’est l’histoire d’une rencontre amoureuse entre un géographe américain, chargé de cartographier l’Arménie, et une jeune photographe arménienne, qui parcourent ensemble le pays. Si les spectateurs arméniens ont savouré la beauté des paysages, ils ont eu du mal à accepter que le rôle principal soit confié à une non-arménienne, en l’occurrence Lubna Azabal (pourtant remarquable quand on ne parle pas couramment arménien…) et se sont plus attachés à repérer les erreurs que les partis-pris artistiques ou techniques.
Heureusement, d’autres films ont su gagner le cœur du public. Que ce soit des films de fiction, comme Lever de soleil sur le lac Van d’Artak Igityan et Vahan Stepanyan, évoquant avec finesse et humour la transmission de l’âme et de l’histoire arménienne entre un survivant du génocide et ses enfants et petits-enfants vivants à l’étranger. Ou documentaire comme Le Dernier hippy de la ville rose d’Anastasia Popova qui a permis d’évoquer le travail foisonnant de Robert Sahakyants, dessinateur et auteur de plusieurs films d’animation
Les pays de la CEI (états indépendants de l’ex Union soviétiques), pour fêter leurs 20 ans d’indépendance, avaient une sélection particulière, occasion unique de voir des films du Kazakhstan, Biélorussie, Tadjikistan, Moldavie ou Ouzbékistan et d’admirer la façon dont les cinéastes locaux utilisent la grammaire universelle du cinéma pour dire leurs préoccupations et leurs espérances. Enfin, pour la première fois cette année, le Festival accueillait une compétition de court-métrages. C’est Glasgow de Piotr Subbotko (Pologne) qui a été récompensé.
Magali Van Reeth
Le Festival de Seattle 2011
«Out of America»
Le jury FIPRESCI au 37e Festival International du Film de Seattle a été invité à primer le « meilleur nouveau film américain » qui n’a pas encore trouvé un distributeur aux États-Unis. L’équipe de programmation du SIFF avait indiqué dans sa présentation qu’ils ont « sillonné le pays pour trouver les derniers et les plus grands films que les cinéastes indépendants américains ont à offrir». « Comme le paysage américain devient jonché des détritus de plus en plus fracturé d’une culture populaire jetable» expliquent-ils, » le SIFF croit que ces films et ces cinéastes représentent la première vague d’une nouvelle tradition, plus résistante et, en définitive, durable de la narration ( storytelling) américaine « .
S’il en est ainsi, pour un juré ou critique étranger , les principaux thèmes et idées trouvés et exprimés dans cette sélection pourraient être, par conséquent, considérés comme une représentation légitime des tendances sociales et culturelles et des visions de la réalité, à la fois dans le cadre du monde des cinéastes indépendants américains « sans distributeurs aux États-Unis », ainsi que celles de toute une génération de jeunes artistes ou d’intellectuels, dans un monde changeant et globalisé (comme les penseurs contemporains et les politiciens aiment à le définir).Curieusement, ou non, dans ce nouveau monde du « nouveau cinéma américain», l’Amérique n’en est plus le centre. Le «rêve» n’est plus américain, il est ailleurs, au-delà des frontières, dans un monde « étranger » qui existe tout d’un coup et fournit un refuge sentimental, socioculturel, voire politique pour les déçus.
Dans le « storytelling » cinématographique américain traditionnel, l’Amérique a toujours été « le Monde ». A la recherche de la réussite, du bonheur, du salut personnel ou, d’autre part, fuyant le destin, toutes ces «odyssées» ont eu lieu au sein des frontières des États-Unis : La fièvre de l’or ou de la célébrité en Californie, peur et dégoût à Las Vegas ou nuits blanches à Seattle. Autrefois le héros des « road movies » voulait se rendre à Memphis ou à Hollywood … Aujourd’hui, Jimmy Testagross (Ron Eldard) dans « Roadie » de Michael Cuesta est viréde son travail et obligé de rentrer chez sa mère dans le Queens et à affronter son passé, tandis que ses anciens camarades de la bande vont en tournée en Amérique du Sud. « Le rêve sud-américain « de Jimmy est brisé. Le «rêve américain» n’est plus qu’une pauvre émission de » téléréalité » ou un cauchemar, un symbole de l’échec. Et l’Amérique du Sud n’est plus synonyme de pauvreté, de danger, de drogue ou de corruption, elle devient une fenêtre sur le monde (nouveau). Le centre du monde pour les héros de « August » de Gay Eldar Rappaport ne se trouve pas aux États-Unis – c’est l’Espagne ou même le Royaume-Uni. «J’ai eu quelqu’un comme vous qui a promis qu’il veut rentrer à la maison. Après trois mois, il est retourné à Londres « , dit le patron de Troy (Murray Bartlett) quand il cherche du travail après un séjour de plusieurs années à Barcelone. Troy, évidemment, sera de retour à Barcelone. Et son ancien amant Jonathan (Daniel Dugan) qui rêve de Madrid va finalement se contenter d’un remplaçant Mexicain. Le très « post-Kubrickien » « Love » de William Eubank commence au cours de la guerre de Sécession, lorsque le lieutenant Lee Briggs se lance dans une mission secrète d’enquête sur un objet mystérieux trouvé dans un canyon du désert occidental. L’action bondit vers l’avenir assez proche, où l’astronaute Lee Miller se rapproche de la fin de son service à bord de la navette spatiale internationale. Cependant, toutes les communications avec la terre s’arrêtent. Miller se retrouve piégé seul, ses systèmes d’aide vitale et sa santé mentale dépérissent. Jusqu’à ce qu’il apprend qu’il n’ya plus de chemin du retour, parce que le monde réel qu’il avait connu n’existe plus . La guerre civile s’est avérée finalement inutile. Dans la mission sur Terre des » Codependent Lesbian Space Alien Seeks Same « , la réalisatrice Madeleine Olnek veut, bien sûr, souligner les problèmes de leurs homologues en Amérique. Là ce ne sont pas des émotions hyperactives qui menacent de détruire la couche d’ozone de notre planète, mais certains gaz à effet de serre prosaïques.
Qu’est qui fait fuir le rêve américain hors d’Amérique? Est-ce la crise économique mondiale qui empiète naturellement sur l’industrie du cinéma? Le monde « post-américain » qui devient politiquement « multipolaire »? La « Fin de l’Histoire », tandis que d’autres commencent la leur? L’ouverture d’une nouvelle génération vers «L’Autre»? Ou, peut-être, des peurs ancestrales et des sentiments de culpabilité, comme ceux qui portent les héros du plutôt gentil « Bigfoot film » écologique de Christopher Munch « Letters From Big Man« , hantés par la présence des habitants « originaux » de leur forêt face à la menace envahissante de la déforestation.
Notre magnifique film primé « On the Ice »», tourné au milieu des champs de neige et des glaciers de Barrow, en Alaska (avec une partie du dialogue parlée dans la langue autochtone) se termine par le départ du coupable, ou auto-coupable héros de sa patrie vers l’inconnu. Nous aimerions croire qu’il va trouver la chaleur, l’ouverture, la bonté et la miséricorde ailleurs dans ce monde. Mais serait-il vraiment capable d’échapper à son destin, dans ou en dehors de l’Amérique? Nous ne le saurons pas.
Gideon Kouts
Pour Mahnaz Mohammadi
Communiqué de Presse du 1er Juillet 2011
L’Union des Journalistes de Cinéma s’élève vigoureusement contre l’arrestation sans préavis et sans aucune information concernant les chefs d’accusation de la cinéaste iranienne Mahnaz Mohammadi, la réalisatrice du film « Femmes sans ombre », militante engagée des droits de la femme, venant après plusieurs autres condamnations et arrestations d’autres cinéastes ces derniers mois.
La censure et l’atteinte à la liberté d’expression du cinéma iranien ne suffisant apparemment pas, c’est à la liberté des cinéastes qu’il est maintenant systématiquement porté atteinte, pour des raisons uniquement politiques.
Comme pour toute situation de ce genre, quel que soit le pays où elle a lieu, l’Union des Journalistes de Cinéma exprime sa solidarité et son soutien à Mahnaz Mohammadi.
Le boom du cinéma d’animation: Annecy 2011
Le 51ème Festival international du Film d’animation, qui s’est tenu sur les bords du lac d’Annecy du 6 au 11 juin dernier, a confirmé l’extraordinaire boom du cinéma d’animation.
Etudiants, producteurs, fans, patrons de studios et réalisateurs – entre autres, Bill Plympton (L’impitoyable lune de miel) et Carlos Saldanha (Rio) : ils étaient tous venus fêter la belle santé d’un genre qui représentait en France 30,24 millions d’entrées en 2010.
Outre la compétition officielle, particulièrement complète avec 180 films sélectionnés parmi près de 2000 candidats (tous formats et toutes nationalités confondus), le festival a pu une nouvelle fois mesurer son succès à la fréquentation de son marché : 450 exposants et 238 acheteurs pour cette édition 2011.
Le Jury Fipresci, qui s’est concentré cette année sur la compétition des courts et des longs métrages, a décerné son prix à Luminaris, un court métrage argentin signé Juan Pablo Zaramella, dont le charme et l’ingéniosité ont également été récompensés du Prix du Public.
Mais le succès du festival d’Annecy, ce sont aussi ses avant premières (entre autres le très ambitieux Prodigies d’Antoine Charreyon) et ses cessions de « Work in Progress », qui permettent de mesurer l’avancée de projets en cours de production. Cette année ont ainsi été dévoilées les premières images de La mécanique du cœur, des Français Mathias Malzieu et Stéphane Berla, et du très attendu Albator – Le corsaire de l’espace, adaptation 3D de la série culte, dont le premier trailer a été présenté en avant-première mondiale et en présence du créateur du dessin animé original, Leiji Matsumoto.
Notons enfin le dernier atout de ce festival extrêmement chaleureux : il n’oublie pas le grand public ! Chaque soir, des projections en plein air ont réuni en moyenne 5000 spectateurs conquis…
Mathilde Lorit
Disparition de Michel Boujut
Nous avons eu la tristesse d’apprendre le décès de Michel Boujut, qui avait obtenu le Prix 2006 de l’UJC pour l’ensemble de son oeuvre
Critique de cinéma d’abord et avant tout, il devait sa notoriété à la célèbre émission Cinéma Cinémas d’Antenne 2, qui marqua les esprits pendant toute une décennie, de 1982 à 1991. Il en était le co-producteur, et faisait souvent les voix off. Mais sa carrière de critique dans la presse écrite avait été tout aussi importante, de Télérama à L’Evénement du Jeudi ou Les Nouvelles Littéraires. Il avait aussi écrit plusieurs romans, dont Le jour où Gary Cooper est mort, un texte autobiographique qui montrait bien comment naquit sa passion du cinéma.
Cannes 2011, ses attraits et la raison de son succès
Pour chaque critique de cinéma, le festival de Cannes est un rendez-vous qu’il faut honorer, il est indispensable de s’y rendre. Pourquoi ?
Parce que Cannes, c’est non seulement la vitrine par excellence du cinéma mondial, mais aussi le centre des évènements para-cinématographiques du monde pendant douze jours. Cannes devient même par ricochet un terrain favorable aux débats concernant les problèmes politiques du monde. C’est pour cette raison que l’engagement tantôt franc et tantôt subtil de sa direction aux côtés des cinéastes malmenés dans leur pays d’origine, en a fait un lieu de haute voltige diplomatique.
Mon expérience personnelle du cru 2011 doit être partagée en trois parties : mon impression de la sélection; l’évènement créé autour des deux films iraniens, dus à deux cinéastes condamnés par le régime iranien, et sélectionnés à la dernière minute; enfin, mon statut cette année de membre du jury de la FIPRESCI
Cette année, comme toutes les autres, on a eu droit aux « grosses pointures » du cinéma qui attirent du monde et font la réputation d’un festival. En revanche, ce systématisme donne l’impression qu’elles considèrent garantie à vie une place en compétition, et qu’elles se laissent aller à paresse et négligence. Woody Allen figure ici en tête, sauf qu’il a choisi de ne participer à aucune compétition depuis quelques années et de ce fait on peut lui accorder des conditions atténuantes. D’autant qu’il a rendu joliment hommage à Paris dans son dernier opus Midnight in Paris. Mais, que dire d’Almodovar, de Moretti et de mon cinéaste de prédilection, le plus novateur d’entre tous, Lars Von Trier ?? Et, les frères Dardenne ? Où est-elle partie leur force d’investigation profonde du malaise des individus écrasés par le poids de leur histoire familiale ou de l’injustice sociale ?
Comment justifier la présence de films tels que Polisse et Drive en compétition? L’un donnant la versionfrançaise de la série télévisée Police de New York, et l’autre, un film purement commercial sans intérêt aucun. Je passe sur le choix du jury qui est souverain…
Les deux films qui se sont détachés de l’ensemble bancal de la sélection sont, sans aucun doute, Le Havre d’Aki Kaurismäki (photo ci-contre) et We need to talk about Kevin de Lynne Ramsay. Deux films magistralement conçus et réalisés d’un bout à l’autre. L’agréable surprise est aussi venue de L’artiste, film muet et en noir et blanc de Michel Hazanavicius, qui a donné à Jean Dujardin la possibilité de montrer son vrai talent.
Evénement autour des deux films iraniens de dernière minute
La société très paradoxale de l’Iran a donné la preuve de sa dualité au travers de deux de ses réalisateurs, qui présentaient leurs œuvres à Cannes, bien que condamnés en première instance, à 6 années de prison assorties de 20 années d’interdiction de tournage, d’écriture de scénario et de sortie du territoire pour l’un d’eux! Il s’agissait bien entendu de Jafar Panahi (ci-contre) et de Mohammad Rassoulof. Or, alors qu’ils sont en attente de leur Appel, Mohammad Rassoulof obtint l’autorisation de tourner et fit parvenir son film Au revoir à Cannes, qui l’a sélectionné pour « Un Certain regard« .
Quant à Jafar Panahi, lourdement condamné, il fit appel à un collègue documentariste, Mojtaba Mirtahmasb, pour mettre en image une journée de sa vie. Un film étonnant est sorti de cette collaboration, au titre ambigu et évocateur de Ceci n’est pas un film. Il fut expédié à Cannes de manière plutôt folklorique et sélectionné pour une séance spéciale.
Enfin, on apprit à la fin du festival que le passeport de Mohammad Rassoulof lui a été restitué. Ce qui veut dire qu’il aurait pu sortir du territoire. Si cette restitution avait été faite un peu plus tôt, il aurait même pu arriver à Cannes pour la projection de son film le 12 mai.
Pourquoi, dirait-on, condamnés pour avoir commencé à faire un film sur les évènements qui ont suivis les dernières élections présidentielles en Iran, les deux cinéastes ne sont-ils pas traités de la même manière ? Tout ceci a fait l’objet de beaucoup de questionnements lors des débats et conférences de presse organisés à Cannes et a fait couler pas mal d’encre dans les média du monde entier.
Etre juré de la FIPRESCI à Cannes, quel intérêt ?
L’avantage majeur d’être juré de la Fipresci à Cannes, c’est le « sur-badge » qui permet un accès un peu plus facile aux projections. Il n’y pas d’invitations à l’hôtel, contrairement à ce qui se passe dans la quasi-totalité des autres festivals. Pour les critiques que nous sommes, la participation au jury demande une tâche supplémentaire: rédiger un rapport pour le site de FIPRESCI.
En deuxième lieu vient le contact avec les collègues venus du monde entier, très enrichissant lors des délibérations. C’est à ce moment qu’on réalise que les critiques de cinéma développent à peu près la même sensibilité quel que soit le pays d’origine. Ceci était très visible lors des délibérations cette année: l’on a passé sous silence, comme par un accord tacite, la majorité des films en ne retenant que ceux qui avaient une certaine valeur ou une valeur certaine… Le Choix de Le Havre fut presque naturel. Un film qui, tout en reprenant tous les ingrédients de l’univers minimaliste de Kaurismäki, montre l’un des problèmes majeurs du Sud de l’Europe. Il montre également, avec une étonnante justesse, une image nostalgique de la France. Ce qui est surprenant de la part d’un cinéaste étranger et de surcroît nordique. Le choix de la langue française dans le style de Kaurismäki ne pouvait qu’ajouter à ce mélange sublime et délicieux.
En guise de conclusion j’aimerais exprimer mon regret du fait que les organisateurs du festival de Cannes n’honorent pas suffisamment le jury de la FIPRESCI, au-delà ce cette aide « technique » de la fourniture d’une carte de priorité, ne serait-ce qu’en l’invitant, au moins une fois ou deux, à une réception où les stars, à la renommée desquelles nous contribuons largement, sont présentes !
Shahla Nahid
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Les producteurs en mouvement pour l’EFP !
Cannes, c’est aussi le rendez-vous des professionnels et des films du monde entier. C’est aussi le lieu où les producteurs tissent des liens pour les films de demain.
Comme d’habitude, l’organisme de promotion du cinéma européen, “European Film Promotion” y a promu son programme d’aide aux jeunes producteurs, “Producers on the move“, qui a déjà récompensé des producteurs comme Bruno Levy ou François Kraus. En 2011, Justin Taurand, des Films du Bêlier, le producteur de Jean-Paul Civeyrac, Antoine Barraud, Shinji Aoyama, et Joachim Lafosse a été à l’honneur pour la France.
Philippe J. Maarek
Les prix de l’UJC 2011
L’UJC a décidé pour la sixième fois d’attribuer des prix annuels destinés à mettre en valeur les métiers dujournalisme cinématographique.
Ont été attribués :
• le Prix de l’UJC 2011, pour l’ensemble de son œuvre, à Jacques Siclier, auteur de nombreux ouvrages, et notamment ancien critique au « Monde » et à « Télérama »
• le Prix de l’UJC de la jeune critique 2011 à Christophe Chabert, critique au « Petit Bulletin » à Lyon
• le Prix de l’UJC de la meilleure biographie ou du meilleur entretien 2011 concernant une personnalité du cinéma, à Laure Adler, pour ses nombreux entretiens fleuve de qualité sur le cinéma à la radio.
• La Plume d’Or 2011 du meilleur journaliste de cinéma de la Presse étrangère en France, enfin, a été décernée pour la sixième fois conjointement par l’UJC et l’Association de la Presse Etrangère à Aldo Tassone, pour sa couverture pluri décennale du cinéma français dans la presse italienne, et son activité corollaire à la direction du Festival de Cinéma Français de Florence.
Jean Roy élu Président de l’Union des Journalistes de Cinéma
Suite à son Assemblée Générale du 6 avril 2011, Jean Roy a été élu Président de l’Union des Journalistes de Cinéma, prenant ainsi la suite de Laurent Delmas, qui en a été à la tête depuis sa fondation, il y a dix ans.
Journaliste et critique de cinéma depuis plus de trente ans, ancien Délégué Général de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes pendant 19 ans, Jean Roy a notamment travaillé à Cinéma, au Panorama de France Culture et à L’Humanité où il écrit depuis 25 ans. Il est également depuis 2010 le Président de la Fédération Internationale de la Presse Cinématographique (Fipresci).
Pour le renouvellement et l’autonomie du « Plan Média »
Communiqué de Presse de l’Union des Journalistes de Cinéma du 1er mars 2011
L’Union des Journalistes de Cinéma s’associe à l’ensemble des organismes professionnels qui demandent instamment à la Commission Européenne de ne pas mettre fin au plan Média et à son apport spécifique à l’audiovisuel, apport qui serait menacé par la fusion dans un programme culturel indifférencié. L’effet de levier du Plan Média depuis vingt ans a été considérable, et a permis de conserver une diversité irremplaçable aux productions des industries audiovisuelles européennes, sans compter le maintien des circuits de diffusion (Europa Cinémas, etc.) qui ont permis à ces oeuvres de trouver leur public.
Le 61° festival de Berlin: un festival et un palmarès courageux!
Pour sa 61ème édition, le Festival de Berlin, premier grand rendez-vous du cinéma mondial de l’année, a été fidèle à lui-même en sachant mettre en compétition officielle un ensemble relativement réduit de seize films destinés bien plus aux circuits d’art et d’essai qu’au grand public, choix de l’exigence – parfois de la difficulté… – d’ailleurs relayé par le jury présidé par la sublime Isabella Rossellini qui décerna son Ours d’Or à Nader et Nissim, du réalisateur iranien Asghar Farhadi
Le jury a ainsi tout à fait partagé l’état d’esprit militant traditionnel du Festival, qui, à l’initiative de son directeur, Dieter Kosslick, avait décidé d’y réserver une place, restée désespérément vide, à Jafar Panahi, auquel son pays vient d’interdire toute activité professionnelle… Nader et Nissim s’était d’ailleurs tourné avec difficulté à cause de la censure locale, et Asghar Farhadi avait failli être forcé de ne pas pouvoir terminer le tournage – il faut dire que sous un prétexte de fiction, la violence des rapports sociaux en Iran y est clairement mise en évidence. Pour bien montrer qu’il ne s’agissait pas d’un hasard, le jury a même décidé de décerner les deux Prix d’Interprétation à toute l’équipe d’aceurs masculins et féminins du film. Bref, des Ours et un palmarès de combat, donc!
En revanche, l’Ours d’Argent du Grand Prix du Jury fit moins surprise, en récompensant le hongrois Belà Tarr pour son Cheval de Turin, un sobre film tout en plan-séquences noir et blanc. Belà Tarr fit d’ailleurs aussi consensus du côté des critiques de la Fipresci qui lui ont décerné leur convoité Prix de la CritiqueInternationale pour la compétition. L’Ours d’argent de la meilleure réalisation décerné à l’allemand Ulrich Köhler pour Maladie du Sommeil fut plus inattendu – on aurait préféré le voir décerné à Michel Ocelot pour son beau film d’animation très visuel en 3D, Les Contes de la nuit, seul film Français en compétition, d’ailleurs. Quant au Prix du Meilleur premier film, le Jury ad hoc alla le chercher dans une nouvelle section du Festival « Génération 14 plus », pour le donner à On the ice, the Andrew Okpeaha MacLean, encourageant ainsi ce qui est l’un des premiers films dû à un réalisateur indigène de l’Alaska, pour une fiction tournée dans sa propre contrée. Parmi les bonnes surprises du festival, enfin, on signalera une véritable résurrection de Wim Wenders dans un film documentaire remarquable sur la chorégraphe et danseuse Pina Bausch, Pina, malheureusement présenté hors compétition, et donc ignoré forcément du palmarès. Wenders arrive à saisir l’esprit de la chorégraphe disparue en utilisant de façon très originale la 3D, utilisée à point pour faire ressortir les saillances de l’art de Pina Bausch, superbement pérennisé de la sorte.
Comme à l’accoutumée, le Festival de Berlin, ouvert au grand public et fort populaire, avec des prix d’entrée très abordables, fut au moins aussi animé dans ses deux principales sections « parallèles » que dans la grande salle Marlène Dietrich de la Compétition. La section « Panorama » animée par Wieland Speck, en quelque sorte l’équivalent à Berlin de « Un Certain Regard » à Cannes, et le « Forum International du Jeune Cinéma » dirigé par Christoph Terhechte, refusèrent très souvent du monde, aussi bien dans les salles du quartier général du Festival, la « Potsdamer Platz », que dans les autres salles disséminées dans Berlin où le Festival se déconcentre pour le plus grand bonheur du public local. Il faut voir le plaisir des Berlinois rattraper les films de la compétition au « Friedrichspalast », une superbe salle de Music-Hall, ou envahir la vénérable salle du Delphi pour le Forum! L’apparition de l’importante section « Generation », qui remplace en partie l’ancienne section des film pour enfants du Festival devenue obsolète, comme la poursuite de l’importante opération « Talent Campus », qui voit apprentis cinéastes et critiques du monde entier venir passer quelques jours d’apprentissage intensif de leur métier au contact de grands professionnels, montre bien l’éclectisme, mais aussi le didactisme voulu par le Festival – sans compter le hobby de son directeur, la section « Cinéma et Cuisine« !
Du côté des professionnels, le Marché du Film berlinois dirigé de longue date de main de maître par Beki Probst, premier lieu de rencontre important de l’année pour les vendeurs et acheteurs du monde entier, a semblé marquer une reprise, après le mouvement déjà enregistré à Sundance. De nombreuses ventes y ont eu lieu, liées ou non à la présentation dans l’une des sections du Festival. Le film de Belà Tarr qui obtint le Grand Prix du Jury fut ainsi l’objet d’achats fébriles par les distributeurs de nombreux pays avant même que le palmarès soit connu. Bien que peu représenté dans les salles « publiques », le cinéma français se vendit également assez bien au Marché, et l’affluence dans le stand « parapluie » d’Unifrance au Marché du Film le montra bien. Pas moins de 33 écrans furent cette fois réservés pour les professionnels accrédités au Marché.
Comme à l’accoutumée, de nombreux autres événements se déroulèrent en marge du Festival, comme l’opération « Shooting Stars » de « European Film Promotion », l’organisme de promotion du cinéma européen à l’étranger, qui mit en valeur dix jeunes acteurs ainsi promus au rand d’espoirs du cinéma européen ou les célèbres « Teddy awards » du cinéma gay et lesbien, bien dans l’esprit d’émancipation qui caractérise le Festival de Berlin et la Ville qui l’accueille.
Philippe J. Maarek