Sakhaline : « On the Edge »,  le festival du bout du monde

La 8ème édition du festival de films « On the Edge » de Sakhaline, qui s’est déroulé du 24 au 31 août dans cette île très éloignée, a donné l’occasion de voyager jusqu’à « la fin du monde » ou, comme dit Alexei Medvedev, son directeur artistique, jusqu’au « commencement du monde ».  Le film de Milad Alami, Danois d’origine iranienne, The Charmer, s’est vu décerner le Grand prix du festival par un jury composé de cinq membres présidé par La réalisatrice iranienne, Tahmineh Milani. Un  jury respectant parfaitement la parité.

SIFFAvant de parler du festival de films de Sakhaline « On the Edge », on se doit de  rappeler sa situation géographique, totalement en rapport avec son intitulé : « au bord du monde » ou « au fin fond du monde ».  Sakhaline, situé à l’extrémité de la Terre, est une île qui se trouve au-dessus du Japon.

Cependant, en ce lieu magnifique et éloigné, le monde contemporain ne semble pas connaître de bord ni de frontières. Le festival y donne les échos de différents événements de la vie dans le monde entier et bien sûr ceux en rapport avec la culture. Pour ainsi dire, celui-ci et les autres  festivals,  en présentant des films venus du monde entier, se font les hérauts du tumulte dans les sociétés  et des  événements qui se déroulent  partout en même temps.

Sakhaline, la fin du monde y prend part de cette façon et les habitants qui remplissent les salles de projection à toute heure, suivent avec joie et bonhommie cet évènement important. Les organisateurs du festival « On the Edge » rappellent que c’est en quelque sorte la réponse de l’Est aux questions de l’Ouest. Ils disent aussi : « Nous apportons les dernières nouvelles de Cannes, Berlin et Venise à Sakhaline où ils rencontrent les nouvelles du cinéma asiatique. L’Europe est la question, l’Asie est la réponse. Le monde est devenu un village planétaire depuis longtemps, mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucune place pour toutes sortes d’originalités culturelles« .

Le festival permet non seulement des rencontres les plus improbables entre les étrangers et les locaux, il incite également la retrouvaille entre les locaux autour du cinéma et d’autres évènements liés à la fête du Septième Art.

En parlant du Septième, on se doit de parler du contenu du festival. Neuf films en compétition officielle et plus de cent films dans différentes sections, et très particulièrement la grande section du cinéma d’animation, donnent un aperçu du rôle qu’On the Edge s’est fixé.

Aussi, le choix du directeur artistique du festival, Alexei Medevedev, démontre son souci de non seulement permettre aux locaux de se tenir au courant de ce qui se passe ailleurs, mais aussi de ne pas céder à la tentation de divertir.

charmerPar conséquent, la qualité des films sélectionnés était au rendez-vous. Hormis le meilleur film de cette édition, The Charmer, qui parlait de la situation des réfugiés au Danemark et toutes les souffrances qu’ils y endurent, il y a eu d’autres films qui se distinguaient par leur qualité et originalité.

Anna’s War (Voina Anny) (La guerre d’Anna) du russe Alexei Fedorchenko, prix de la meilleure réalisation racontait de manière presque abstraite, le combat d’une petite fille de six ans, échappée au massacre de la population de tout un village y compris ses parents, pour survivre dans un espace réduit. Ce film étonnait par son style, son langage cinématographique, ses prises d’images et par les angles choisis par le réalisateur. Avec un minimum de mise en scène, il arrivait à transmettre toute l’horreur de la guerre et la bonté d’une enfant malgré les épreuves harassantes.

Le non moins efficace Scary mother (Sashishi deda)(Une mère effrayante),  de la réalisatrice géorgienne, Ana Urushadze, qui a valu le prix de la meilleure interprétation féminine à son personnage principal Manana (Nata Murvanidze), abordait le sujet des tabous imposés aux femmes écrivaines qui choisissent de parler librement du sexe. La réalisatrice parvenait à transmettre toutes les injustices faites aux femmes dans un huis clos étouffant. Le choix des décors et des scènes parfois absurdes permettait d’observer toutes les tentatives d’une femme douée et étrange pour sortir de son statut de mère au foyer. Mieux qu’un manifeste, Scary motherarrive à induire beaucoup de questionnements. Il ne laisse pas indifférent.

Encore un autre film russe, L’histoire d’un rendez-vous (Istoriya odnogo naznacheniya)de Avdotia Smirnova, prix du public, basée sur une histoire vraie, donnait toute la dimension de l’absurdité des lois militaires et des abus faits au nom de ces lois. L’histoire racontait l’implication du comte Léon Tolstoï dans une affaire militaire concernant un pauvre soldat privé de toute affection pendant toute sa courte vie qui offense un gradé. Un troisième personnage, le lieutenant Grigory Kolokoltsev, d’une famille bourgeoise et d’un père militaire, qui déçoit ce dernier par ses idées progressistes et son style de vie trépidant, donne l’ampleur de la complexité des rapports humains et des tournures que la vie prend, entrainant l’individu dans des voies inattendues.

Enfin ne peut ne pas évoquer l’excellent thriller danois, The Guilty, de Gustav Möller, programmé pour l’ouverture du festival

Shahla Nahid

Quelques questions à  Alexei Medvedev, le directeur artistique du festival « On the Edge

S. Nahid: Comment est née l’idée d’organiser un festival dans un endroit si éloigné du reste du monde ?

MedvededA. Medvedev : D’un autre point de vue, cet endroit peut être considéré comme le commencement du monde car c’est ici que le jour commence sa course dans le monde entier. Même si je crois que potentiellement Sakhaline pourrait être un centre économique et industriel, nous sommes ici pour organiser un festival de films. Un festival dans un endroit magnifique où se rencontrent des gens et des cultures différentes.

Lorsque nous avons été approchés par le gouverneur de Sakhaline il y a 8 ans, mes collègues et moi tout comme le producteur du festival, Alexei Agranovich, nous étions très enthousiastes. C’était un projet très excitant pour nous.

Nous avons organisé la première édition en deux mois. Ce fut une expérience rapide mais très réussie. Le public local était très spécialement inspirant : Ioujno-Sakhalinsk, la capitale de Sakhaline n’est peuplé que d’environ 200.000 personnes, or nous avons eu 35.000 spectateurs pour cette première édition. Nous n’avions jamais imaginé une telle soif pour les réalisations artistiques venues du monde entier.

Dans la même région, il y a l’un des plus importants festivals asiatiques, le festival international de films de Busan. Comment vous situez-vous par rapport à lui?

Busan, c’est tout à fait différent. C’est un gigantesque festival de cinéma avec un marché et une part énorme d’industrie de films. Nous n’en sommes pas à ce stade, bien que nous montrions plus de 100 films, ce qui est un chiffre assez élevé pour un festival régional de films en Russie. Nous ne pouvons pas être compétitifs sur le plan de l’industrie cinématographique, mais nous pouvons l’être sur le plan de la qualité artistique. C’est pourquoi nos invités de la région ou d’Europe viennent à notre festival et apprécient la qualité des films que nous présentons. C’est un festival pour le public et pour la communauté du cinéma.

Vous donnez une place très importante à l’animation et aux films pour enfants, pourquoi ?

Cela tient à une grande  et ancienne amitié entre les animateurs russes et japonais : Hayao Miyazaki est un ami de Yuri Norstein, l’un des animateurs les plus connus en Russie. Cette réalité a donné l’idée du programme « Miyasaki et les autres » qui tente de faire connaître l’art de l’animation japonaise et russe aux enfants. C’est logique parce que l’histoire de Sakhaline est liée au Japon. D’autre part, après cette première idée de rencontre entre l’Est et l’Ouest, entre l’Europe et l’Asie, nous devenons de plus en plus globaux. Bien sûr, nous sommes toujours attentifs à l’industrie cinématographique de l’Asie, mais nous sommes en expansion constante et nous n’invitons pas seulement les animations de cette région. Par exemple, cette année, nous avons un film d’animation, Le virus tropica« , venu d’Equateur.

Pouvez-vous nous décrire un peu l’atelier « l’île » parce que vous visez des films faits sur Sakhaline ou réalisés par des cinéastes originaires de Sakhaline ?

Medvedev : comme je l’ai évoqué auparavant, la base de notre festival de films est son statut basé sur  des programmes d’activités sociales et artistiques pour les habitants. L’une des premières idées était de concevoir un film pour  ceux qui étaient intéressés  par la réalisation mais qui n’étaient pas des professionnels. Il y avait aussi quelques réalisateurs  et des documentaristes. Mais, nous voulions aider ceux qui voulaient réaliser eux-mêmes avec l’aide de ce moyen de communication. Je dois dire que l’aide de notre festival a généré quelques succès et a abouti à la réalisation et la production de quelques films sur Sakhaline. Quelque sept films ont vu le jour et sont allés partout dans le monde, invités par des  festivals de films. Par ailleurs, l’un des films, « Sexe, peur et hamburger », produit  par notre atelier du film de Sakhaline, est programmé cette année dans la section « Orizzonti » (Horizons) de la Mostra de Venise… Par conséquent, nous voyons que le monde devient encore plus global. Je veux dire par là qu’un court-métrage provenant d’un modeste atelier de la lointaine île de Sakhaline, foule le tapis rouge du festival de Venise à Lido…

Vous avez choisi une célèbre réalisatrice iranienne, Tahmineh MILANI,  comme présidente d’un jury comprenant  deux  autres femmes parmi ses cinq membres. Y a-t-il une raison particulière derrière ce choix ainsi que celui de beaucoup de femmes cinéastes en compétition ?

La moitié des cinéastes présents en section compétition sont des femmes. Certes, je ne dis pas que cette année, je dois avoir des films sur la situation écologique, des films réalisés par des femmes ou des films réalisés en Amérique latine. Ça ne m’arrive jamais. Je voyage et je regarde des films. J’ai mon intuition et mon plan, ce que j’aimerais voir. J’ai en tête des cinéastes peu connus dont j’aimerais suivre le travail… C’est ainsi que le programme voit le jour. C’est ensuite que l’on voit apparaître les tendances, les lignes. L’une des tendances de cette année concerne les femmes cinéastes qui relèvent la tête pour revendiquer leurs droits et  leur position dans l’industrie cinématographique. Il s’agit d’un processus objectif et bien justifié. Cela montre aussi que mes intuitions étaient bonnes et qu’elles avaient des bases solides.

Pour la libération d’Oleg Sentsov

Communiqué de Presse du 12 août 2018

L’Union des Journalistes de Cinéma s’associe à l’appel de la Société des Réalisateurs Français demandant la libération du cinéaste Oleg Sentsov, né urkainien à Simféropol, en Crimée, où il a été arrêté en 2014 lors du rattachement de cette région à la Russie, pour ses prises de position contre ce rattachement.

Le 21° Festival international du film de Zanzibar

Vitrine incontournable du cinéma d’Afrique de l’est et de l’Océan indien depuis vingt ans, le Festival international du film de Zanzibar s’est déroulé du 7 au 15 juillet 2018 dans cette superbe île de Tanzanie, posée dans le canal du Mozambique.

Ici comme ailleurs, le cinéma reflète les préoccupations contemporaines des artistes et du public africain. Aussi, c’est aux changements de mentalités que les réalisateurs de cette région s’attaquent. Notamment au rôle traditionnel de l’homme, dominateur dans tous les domaines, que ce soit au sein de sa propre famille (imposant le silence et à la soumission à sa femme et ses enfants) ou dans le domaine plus large de la vie publique et politique (corruption, agression sexuelle, manque d’accès à l’éducation pour les filles et les classes défavorisées). Cette dénonciation d’une attitude ancestrale s’accompagne parallèlement de la remise en question de certains aspects nocifs de la modernité (accumulation des biens matériels et fascination pour l’argent).

Les films récompensés par les principaux jurys montrent bien ces préoccupations ainsi que la diversité du cinéma de cette région du monde.

Silas : No more Bussiness as Usualde Anjali Nyar et Hawa Essuman (Afrique du sud/Canada/Kenya, 2018) a obtenu le prix du meilleur documentaire. A l’initiative d’une association dénonçant les illégalités et le népotisme du gouvernement de la présidente Ellen Johnson Sirleaf (2005-2018), Silas est un activiste politique recueillant les preuves de la vente des biens nationaux aux entreprises commerciales internationales (comme les forêts pour l’exploitation de l’huile de palme). Avec une mise en scène rigoureuse, ce documentaire montre avec clarté les conflits entre le développement économique, le respect des communautés locales, et la protection de l’écosystème.

Le prix du meilleur film de l’Océan indien est allé à Majande Rahman Seifi Azada (Iran, 2017). Dans n’importe quelle famille, un enfant handicapé provoque de nombreux bouleversements mais dans certains pays, les mentalités l’associent à une malédiction et aggravent les tensions. En Iran, une famille est déchirée entre honte et amour maternel. Un film émouvant et bien joué, avec une scène finale à couper le souffle…

Le « East African Talent Award », attribué par l’association SIGNIS et doté d’un prix de 1000 dollars US pour récompenser un jeune cinéaste prometteur, est allé à Kemiyondo Coutinho, actrice et réalisatrice d’un court-métrage impressionnant et courageux, Keynvu. Il dénonce la récente loi ougandaise interdisant le port de la mini-jupe pour éviter les viols. Non seulement la réalisatrice rappelle que ce sont les hommes qui sont responsables des viols et pas la minijupe mais aussi qu’ils doivent prendre leur part dans l’élimination de ces crimes.

zanzibar 2018Primé plusieurs fois, et en particulier comme meilleur film africain, Supa Modode Likarion Wainaina (Allemagne/Kenya, 2018) continue sa belle carrière depuis la Berlinale. Il est dommage que ce film, qui utilise la magie et les couleurs du cinéma pour embellir le quotidien d’une fillette malade, n’ait toujours pas de distributeur en France.

Enfin, quelques autres révélations du festival. Un film venu d’Ouganda, The Forbidende Kizito Samuel Savior : à travers un groupe d’adolescents, issus de différentes classes sociales, une découverte de la vie à Kampala aujourd’hui. Liyanad’Aaron Kopp : au Swaziland, un orphelinat recueille les enfants dont les parents sont morts du sida et, à l’aide d’un atelier d’écriture et de travaux manuels, leur permet d’exprimer leurs peurs et leurs espérances – ou comment le cinéma nous aide à gérer nos émotions… Enfin The Great Mused’Abdulrahman Kwahi (Arabie saoudite) raconte avec peu de moyens techniques mais une grande inventivité et beaucoup d’humour, les désarrois d’un jeune homme d’une riche famille n’osant pas dire à son père, qui lui impose des études de médecine, qu’il veut être poète !

Cette 21° édition du Festival international du film de Zanzibar a sélectionné de nombreuses femmes réalisatrices, preuve qu’elles existent bien en Afrique ! Mais aussi, à l’ombre des poids lourds du cinéma comme le Nigeria et l’Afrique du sud, le Festival a montré la montée en puissance du Kenya, où existe une véritable politique pour le soutien du cinéma et l’aide aux réalisateurs locaux.

Magali Van Reeth

L’engagement au cœur des films du Festival International du Film d’Animation d’Annecy

Le Palmarès de la 42eédition de la compétition long-métrage du Festival International du Film d’Animation d’Annecy a récompensé des films à tonalité politique : les cinéastes primés racontent l’état du monde à travers le régime des Khmers rouges, la présence des talibans en Afghanistan…

Il y a dix ans, en 2007, Persepolis de Marianne Sartrapi et Vincent Paronnaud dessinait l’itinéraire d’une jeune fille aux prises avec l’histoire iranienne d’abord à l’époque du Shah et ensuite à l’arrivée de la République islamique. L’année suivante, Valse avec Bachir, de l’Israélien Ari Forman confirmait l’engagement du cinéma d’animation avec un récit autobiographique antimilitariste. C’est à cette période que le cinéma d’animation a pris un virage, prenant à bras le corps les sujets politiques.

ParvanaLors de la clôture de cette 42eédition, Parvana, une enfance en Afghanistan de l’irlandaise Nora Twomey, adapté de « The Breadwinner » de Deborah Ellis, a obtenu le Prix du jury long métrage et le Prix du public. Histoire d’une petite fille confrontée aux talibans, le film montre comment Parvana résiste à l’inculture par l’écriture et comment avec un trésor d’imagination, elle parvient à sauver les siens alors que son père est en prison. Le fait qu’elle sache lire et écrire va lui ouvrir des portes et lui permettre de résister à la barbarie. Le film alterne entre le réel, la vie de la petite fille, et un récit teinté d’onirisme où l’on voit un petit garçon partir à la recherche de semences pour sauver des villageois de la famine. Ce récit issu des contes populaires devient la métaphore de la douleur de la petite fille. Le film oscille entre l’idée d’un paradis perdu et de rêves de paix incarnés dans cette phrase : « C’est la pluie qui fait pousser les fleurs, pas le tonnerre ». En Afghanistan, pays où les femmes sont muselées et vivent derrière des murs, le message de Nora Twomey est féministe: sous les traits d’une petite fille qui détourne les interdits qui pèsent sur les femmes, de sa sœur qui refuse un mariage « arrangé », le film choisit l’imagination et l’émancipation contre l’oppression.

La figure de l’enfant porteur d’espoir évoque La Tour de Mats Grorud présenté hors compétition. Wardi une petite fille de onze ans vit dans un camp de réfugiés à Beyrouth. Sidi, son arrière grand-père malade y réside depuis le Nakba (La grande catastrophe) du 15 mai 1948 lorsque la terre de Palestine fut récupérée par Israël. Le vieil homme essaie de lui transmettre le moyen (la clé) de découvrir les éléments de l’Histoire et surtout pourquoi sa famille vit encore là depuis 70 ans. Lors de très émouvantes séquences le vieil homme évoque la beauté des grenadiers, des orangers, des goyaviers, du jasmin et du gardénia. A l’aide de photos incluses dans le récit, la petite fille découvre la vie de sa famille avant 1948 : « Si nous ne nous souvenons pas de notre passé, nous sommes rien » lui dit-on. Au fil des années la tour prend de la hauteur et c’est le moment pour la petite fille Wandi de l’escalader pour découvrir son histoire. Pour réaliser ce film le réalisateur a passé un an dans un camp au Liban et s’est inspiré de conversations qu’il a eues.

FunanFunan de Denis Do a reçu le « Cristal » du meilleur long-métrage. Le réalisateur âgé de 33 ans s’est inspiré du passé de sa mère pour raconter la vie d’une famille sous le régime des Khmers rouges. Ce film retrace le combat d’une cambodgienne et de son mari séparé de leur enfant lors de la révolution Khmère de 1975. Il s’agit de la mère du réalisateur exilée en France avec son fils. Ce récit autobiographique défini comme une fiction s’appuie sur de solides références documentaires. Funan, premier film d’animation sur l’histoire du Cambodge fait figure d’œuvre cathartique et vient compléter aujourd’hui le travail du grand cinéaste Rithy Panh.

Enfin Le Mur film documentaire d’animation de Cam Christiansen présenté en compétition suit le scénariste David Hare qui explore les répercussions de la barrière de séparation israélienne sur les habitants de la région.

Au fil du temps et après cette quarante deuxième édition du Festival d’animation d’Annecy, on prend conscience que ce cinéma devient pour les jeunes auteurs un moyen de parler de la géopolitique sans pour autant négliger la poétique du dessin, comme si les deux constituaient un assemblage vivant et percutant. Outre cet aspect, le cinéma d’animation permet de contourner la censure présente dans certains pays comme l’Iran même pendant le tournage – on connaît aujourd’hui les conditions dans lesquelles Jafar Panahi réalise des films, et les ruses qu’il emploie, en filmant dans une voiture (Taxi Téhéran) ou dans un lieu protégé comme le village de ses parents avec une petite caméra (Trois visages). Malgré tout la menace pèse aussi sur l’animation. Le film fini peut susciter des interdictions à l’instar de Have Nice Day de Liu Jan censuré par les autorités chinoises à Annecy en 2017 et sorti en salles cette semaine. Le film montre une Chine urbaine gangrénée par le capitalisme et la puissance de l’argent.

Rien n’est définitif et les films d’animation dessinent le monde à leur façon, et, la beauté du trait ou les autres formes d’expression, le sens donné à l’Histoire par l’écriture, font de cet art un moyen puissant de raconter le monde, désastres et beautés.

                                                                                         Michèle TATU

Cannes 2018: à propos de « Kfarnaum », de Nadine Labaki

L’enfant Zein – un petit Jésus dans un monde noyé dans le chaos : dans Kfarnaum Labaki, prix du Jury du festival de Cannes 2018, est plus proche de la vie réelle qu’elle ne l’est du cinéma d’auteur

Après avoir remporté ce Prix du jury pour Kfarnaum, la cinéaste libanaise Nadine Labaki a profité de l’occasion pour lancer un appel public en faveur des enfants libanais privés de vie décente et d’opportunité d’aller à l’école. Elle considérait une enfance difficile comme « la racine de tous les maux du monde » et appelait le public à « ne plus détourner le regard de ces enfants qui souffrent dans leur lutte contre le chaos« . Cela semble être sa dernière vision de ce que le cinéma devrait être : « la plus forte des armes dans la sensibilisation à des questions particulière. »

nadine-labakiAvec ce troisième film, Nadine Labaki a ramené le Liban – ce petit pays à la modeste production de films – à Cannes après une absence de 26 ans. La dernière fois qu’un film libanais a gagné un prix au festival, c’était en 1992, quand Maroun Bagdadi a remporté le prix du meilleur scénario pour son film La fille de l’air, moins d’un an avant sa mort subite. L’année précédente, il avait également remporté le Prix spécial du jury pour son film Hors la vie. Ceci explique la joie avec laquelle la nouvelle du prix de Labaki a été reçue de l’autre côté de la Méditerranée et le grand enthousiasme au Liban. Le fort succès public de ses deux films précédents a également concouru à susciter l’enthousiasme pour Kfarnaum parmi ses fans.

Ce nouveau travail, cependant, est radicalement différent dans le style et le contenu de ses deux œuvres précédentes (qui étaient toutes deux sélectionnées à Cannes). Son premier film, Caramel, a été projeté en 2007 à Cannes dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs, tandis que son second Halla’la-wein (Où allons-nous maintenant) a été projeté en 2011 dans la section Un certain regard. Les deux films sont attrayants, des comédies-drames légères sur la société libanaise où les femmes sont au centre de la scène. Le premier se déroule dans un salon de beauté qui se transforme en un forum pour les femmes dans une ville pleine de confusion après la guerre civile. Le second se passe dans un village de montagne isolé où les femmes essayent de diverses façons de confronter leurs hommes afin de les empêcher de participer à la guerre. Les deux œuvres dépeignent les événements de l’intrigue dans un cadre comique qui transforme le drame qui se déroule en une série de séquences divertissantes qui façonnent finalement les histoires racontées dans le film.

Cette fois-ci, Nadine Labaki a surpris tout le monde en choisissant un sujet différent, où elle s’est éloignée du monde des femmes et des histoires d’amour pour présenter une histoire tout droit sortie de la réalité. Elle a pris soin de garder secret le sujet du film, qui a demandé six mois de tournage. Il était évident que les changements qu’elle a personnellement vécus ainsi que ceux subis par le Liban (ainsi que par plusieurs autres pays arabes) depuis 2011 ont influencé sa conception de l’art du cinéma et de son rôle.

Sept années s’écoulèrent entre son dernier film et celui-ci, au cours duquel Nadine Labaki devint mère et entra dans le monde politique à travers le milieu de la « société civile », en tant que candidate aux élections municipales sur la liste de Beyrouth Madinati, une coalition politique qui vise à défier la corruption des partis politiques traditionnels. Ce nouveau sentiment d’engagement politique et la vie compliquée et difficile de Beyrouth ont poussé la réalisatrice à tenter, comme elle l’a dit plus d’une fois, d’influencer le cours des choses par le biais d’une participation active la « société civile » et aussi grâce à sa caméra, qu’elle positionne différemment.

Le sujet de Kfarnaum reste social, mais n’est plus situé dans un endroit somptueux comme un salon de beauté, ou un endroit idyllique comme un village de montagne reculé. Il se déplace dans les rues bondées de Beyrouth, en constante évolution sous l’impact de la guerre dans la Syrie voisine. En dépit de sa petite superficie et de sa population, le Liban est actuellement le pays où le plus grand nombre de réfugiés syriens se trouvent – plus de 1,5 million de réfugiés syriens vivent dans ce pays dont ils constituent un tiers de la population.

Le film adopte une approche documentaire et inclut un ensemble divergent d’histoires qui touchent à de nombreux sujet. Cependant, cette structure dramatique, conçue dans le style habituel de Labaki, ne fonctionne pas dans ce cas en faveur du film, car elle n’aide pas à s’investir profondément dans l’histoire. L’intrigue combine l’histoire de l’enfant Zein qui est maltraité par sa famille avec des questions telles que l’immigration sans papiers, les travailleurs migrants exploités et le mariage des enfants (dans le cas de la petite sœur de Zein, que l’on marie à un homme adulte). Le film semble essayer de fonctionner dans tous ces domaines à la fois pour attirer la sympathie du spectateur, et de ce fait tombe dans une sentimentalité excessive qui produit l’effet inverse. Il manque les moments intimes qui doivent être ajoutés à toute scène cinématographique pour que nous puissions sympathiser avec les personnages, comme c’est le cas dans la scène où Zein tente de sauver la vie d’un autre enfant plus jeune et le nourrit. Cette scène, où les deux enfants sont seuls, est l’une des scènes les plus touchantes et artistiquement les plus sincères du film.

Malheureusement, la sombre réalité de Kfarnaum submerge le langage du cinéma et ses possibilités. La cinématographie, qui dépeint la ruine et le chaos de l’endroit, oublie la nécessité de porter le lieu dans un autre temps, celui qui fait partie du film. Labaki ne parvient pas vraiment à créer un monde artistique parallèle, convaincant et embrassant la réalité qu’elle dépeint, et elle n’arrive pas non plus à donner au film la touche personnelle qui suggérerait un langage cinématographique plus solide et mature.

Outre les deux personnages principaux, elle ne parvient pas non plus à gérer le reste des acteurs amateurs. Les performances de la mère, de la sœur et du reste des caractères secondaires ne sont pas convaincantes , et n’aident pas le film. À mon avis cependant, le plus gros problème de Kfarnaum vient du dialogue. Zein prononce des mots qui sont beaucoup trop complexes pour un garçon de 12 ans, même si l’école de la vie dans la rue a peut-être aiguisé sa conscience, au point qu’il commence à prêcher aux autres, en particulier aux adultes. Cela nuit au film, car il le fait en s’exprimant trop brutalement.

Tous ces élément alourdissent le film la plupart du temps, dans son traitement et son rythme, et l’éloignent de la légèreté et de la fluidité requises. C’est amplifié par la durée de Kfarnaum qui est de plus de deux heures, à partir des 500 heures initiales du tournage. Tout comme Labaki, qui joue elle-même dans Kfarnaum le rôle de l’avocat qui veut défendre l’enfant Zein contre ses parents imprégnés d’ignorance et de pauvreté, dans son rôle de réalisatrice, elle fait de la caméra l’avocat défendant la réalité de cette enfance contre la société : « Je voulais savoir pourquoi la société a tellement laissé tomber ces enfants!« . En somme, Kfarnaum est finalement plus proche d’un documentaire sur le monde réel que d’une interprétation cinématographique.

Houda Ibrahim

Une_affaire_de_familleLe palmarès du Festival 2018:

Palme d’or : Une affaire de famille d’Hirokazu Kore-eda

Palme d’or spéciale : Jean-Luc Godard pour Le livre d’image

Grand prix : BlacKkKlansman de Spike Lee

Prix d’interprétation féminine : Samal Yeslyamova pour son rôle dans Ayka

Prix d’interprétation masculine : Marcello Fonte pour son rôle dans Dogman

Prix de la mise en scène : Cold War de Pawel Pawlikowski

Prix du jury : Capharnaüm de Nadine Labaki

Prix du scénario ex-aecquo : Alice Rohrwacher pour Heureux comme Lazzaro et Nader Saeivar pour Trois visages de Jafar Panahi.

Prix FIPRESCI de la Critique Internationale:  Burning de Lee Chang-dong, pour la Compétition,  Girl de Lukas Dhont pour Un Certain Regard, et  Un jour de Zsófia Szilàgyi (Semaine de la critique) pour les sections parallèles

Les Prix de l’UJC 2018

UJC 1Lors d’une cérémonie de remise de prix organisée en partenariat avec l’Association de la Presse Etrangère à la Mairie du 4° arrondissement de Paris, l’Union des Journalistes de Cinéma a remis ses prix pour 2018:

  • • le Prix de l’UJC 2018,pour l’ensemble de sa carrière, à Patrick Brion
  • • le Prix de l’UJC de la meilleure biographie ou du meilleur entretien 2017 concernant une personnalité du cinéma, à Stéphane Goudet et Louise Dumas pour leur entretien avec Ildiko Enyedi dans « Positif »
  • • La Plume d’Or 2018du journalisme de cinéma de la Presse étrangère en France, enfin, a été décernée pour la douzième fois conjointement par l’UJC et l’Association de la Presse Etrangère à Moritz Pfeifer

Enfin l’Association de la Presse Etrangère a remis son « Prix de la Mémoire du Cinéma » annuel à Jean-Pierre Léaud après une émouvante « conversation » lors de laquelle Jean-Pierre Léaud a pu revoir des images du petit Antoine Doinel interrogé par une journaliste…

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Conditions de travail des journalistes à Cannes: communiqué de l’UJC du 12 avril 2018

Communiqué de presse de l’Union des Journalistes de Cinéma du 12 avril 2018

Lors de la conférence de presse de ce jour, le Festival de Cannes n’est pas revenu sur sa décision de ne plus projeter les films aux journalistes et critiques de cinéma dans des séances de presse leur permettant de les voir en temps utile. Il ne s’agit pas d’un caprice de ces professionnels, mais d’une nécessité de publication de leurs articles au moment où l’on parle de chaque film, lors de la projection de gala qui suivait d’ordinaire, laissant ainsi le temps aux journalistes de faire leur travail – et particulièrement aux journalistes étrangers, comme le communiqué de presse de la Fipresci, la Fédération de la Presse Cinématographique Internationale, vient de le rappeler.

L’Union des Journalistes de Cinéma demande à nouveau à ce qu’un calendrier de projections réservées à la presse lui permettant de faire son travail normalement soit rétabli par le Festival,  et propose qu’en contrepartie, les journalistes signent à réception de leur accréditation un engagement d’embargo absolu de publication avant la fin de la projection de gala.

La Berlinale 2018 sous le signe de #MeToo

Le Festival de Berlin, à sa 68° édition en 2018, a traditionnellement toujours été placé sous le signe de la politique. Politique de la main tendue, tout d’abord, jusqu’à la chute du Mur qui coupait la ville en deux, lorsque c’était un des lieux de rencontre de l’Europe de l’Ouest et de celle de l’Est, avec des sélections de films placées sous le signe de l’équilibre entre les deux blocs de la Guerre Froide. Politique de la réconciliation, ensuite, entre les deux Allemagnes réunifiées. Politique de l’acceptation de la diversité, enfin, avec la transposition par certains choix des sélectionneurs de la générosité traditionnelle berlinoise envers ce que l’on appelle aujourd’hui les LGBT, la remise dans son cadre des « Teddy Awards » réservés aux films gays et lesbiens depuis 1985 en étant le signe le plus manifeste. C’est dire qu’il ne fut pas surprenant de constater que le millésime 2018 de la manifestation s’était ostensiblement placé sous le signe de l’hashtag #MeToo. Le festival s’étant doté cette année d’une charte de bonne conduite, en quelque sorte, en diffusant largement son exigence de non-discrimination et de protection contre toute sorte de harcèlement des festivaliers, les professionnels comme le public payant. D’ailleurs, la Berlinale pouvait se targuer d’être au-dessus de tout soupçon en matière d’égalité entre les sexes, puisque l’Ours d’Or avait été attribué l’an dernier à la talentueuse Ildikó Enyedi pour On Body and Soul.

TouchMeNotLe palmarès du jury, présidé cette année par le réalisateur allemand Tom Tykwer, fit cette année la part encore plus belle aux femmes, en somme, puisqu’elles y furent encore mieux représentées. L’Ours d’Or, tout d’abord, fut à nouveau attribué à une réalisatrice, la Roumaine Adina Pintilie, pour Touch Me Not, film intimiste sur les difficultés d’une femme ne supportant pas d’être touchée et donc les rapports sexuels, et sur ses tentatives de se dépasser. Premier film, Touch Me Not reçut d’ailleurs également le prix décerné à ce titre, l’équivalent berlinois de la Caméra d’Or cannoise, le Prix GWFF, doté de 50.000 euros. Quant au dauphin, L’Ours d’Argent Grand Prix du Jury, il fut également décerné à une réalisatrice, la polonaise Małgorzata Szumowska pour Twarz (Mug pour l’exportation).  Même le prix Glashütte du meilleur documentaire, toutes sections confondues, décerné par un jury ad hoc, revint également à une réalisatrice, l’autrichienne Ruth Beckermann pour Waldheims Walzer (La Valse de Waldheim), un documentaire introspectif sur la révélation du passé nazi de Kurt Waldheim, ancien Secrétaire Général de l’ONU alors qu’il tentait ensuite de se présenter à la présidence de l’Autriche.

201819628_2La répartition des autres Ours d’Argent fit à peu près le tour des autres films les plus remarqués d’une sélection officielle assez inégale. Le prix de la meilleure réalisation revint à Wes Anderson pour son original film d’animation Isle of dogs, qui fit l’ouverture du festival, une œuvre pleine de dérision montrant l’évacuation de force dans une île dépotoir de l’ensemble des canidés d’une ville japonaise en proie d’ici quelques décennies à une maladie du « chien fou » assez semblable à celle de la « vache folle », du fait du contact des humains avec les chiens malades. Le prix de la meilleure actrice revint à Ana Brun pour sa prestation dans Las herrederas (Les héritières), de Marcelo Martinessi, un film qui reçut également le prix Alfred Bauer du film innovant et le prix FIPRESCI de la critique internationale pour la compétition. Le prix du meilleur acteur fut décerné à Anthony Bajon pour sa prestation dans La Prière, de Cédric Kahn, seule représentation de la France au palmarès. Les Espagnols Manuel Alcalà et Alonso Ruizpalacios se partagèrent le prix du meilleur scénario pour leur travail dans Museo, réalisé par ce dernier. Enfin, le prix de la meilleure contribution artistique revint à Elena Okopnaya pour ses costumes et son travail dans Dovlatov, d’Alexey German Jr. On regrettera peut-être simplement l’absence d’une mention au palmarès pour l’exigeant Transit, de Christian Petzold, où les situations de la France en voie d’occupation par les troupes allemandes durant la Seconde Guerre Mondiale sont vécues en une sorte d’uchronie dans le cadre de la France d’aujourd’hui.

Parmi les autres récompenses, on signalera les deux autres prix FIPRESCI de la critique internationale, River’s Edge, du japonais Isao Yukisada, pour la section « Panorama » et An Elephant Sitting Still, du chinois Hu Bo, présenté au Forum International du Jeune Cinéma.

Un festival en voie d’évolution

Nous avions évoqué au fil des années l’importante diversification du festival, devenu de plus en plus protéiforme, entre l’augmentation du nombre de films présentés dans ses diverses sections, et la volonté affirmée par le Directeur de la Berlinale, Dieter Kosslick de délocaliser autant que possible la manifestation dans la ville, et pas seulement autour de son quartier général de la Potsdamer Strasse. Or comme Dieter Kosslick a annoncé un peu avant le début du festival qu’il ne demanderait pas le renouvellement de son contrat, qui s’achèvera après le millésime 2019 de la manifestation, les festivaliers multiplièrent les rumeurs. Celle qui revenait le plus souvent était la possibilité d’un resserrement du nomrbe de films de la Berlinale afin d’en accroître l’intérêt pour les journalistes et critiques.  D’ailleurs, le renouvellement avait déjà commencé pour la section Panorama, dont son excellent directeur de longue date, Wieland Speck, a abandonné cette année la direction, revenue à un trio formé de Paz Lazaro, Michael Stütz, et Andreas Struck – le Forum restant animé par Christoph Terhechte.

2014_0467_ORGUn marché du film européen… de plus en plus mondial !

Bien évidemment, ce resserrement ne concernerait que le Festival à proprement parler, et pas son Marché du Film. Le « Marché du Film Européen » qui avait été fondé par Beki Probst a en effet pris une résonnance mondiale, et il s’agit maintenant incontestablement du premier rendez-vous de l’année des professionnels du cinéma du monde entier, avec 9000 participants inscrits en 2018 pour sa 30° édition, selon les indications données à la presse. D’ailleurs, le marché a littéralement explosé physiquement cette année, puisque les stands sont maintenant répartis sur trois lieux. L’augmentation de la participation s’est faite physiquement sentir jusque dans les espaces dédiés aux stands. Avec 45 compagnies enregistrées pour le Marché en 2018, la France avait le contingent national le plus important. Unifrance, bourdonnant d’activité du matin au soir, a même dû sacrifier son « espace café » afin de laisser plus de place à nos professionnels de l’exportation ! Selon l’ensemble des observateurs, les achats ont été fort nombreux cette année, et pas seulement du fait des « nouveaux » acteurs, Amazon et autres Netflix, mais aussi du fait des acheteurs traditionnels pour les salles de cinéma.

Le Marché du Film, maintenant dirigé par Matthijs Wouter Knol multiplie par ailleurs les initiatives, avec cette année une focalisation sur le documentaire, mais aussi un séminaire sino-européen « Bridging the dragon », une série de débats, des ateliers de travail, etc. Maintenant présidente du Marché, Beki Probst, à l’origine et animatrice de cette évolution durant trois décennies, a d’ailleurs été récompensée d’un prix spécial durant le festival, la « Berlinale Camera ».

Das Abenteuer einer schönen Frau, Deutschland 1932: Regie: Hermann Kosterlitz Une rétrospective remarquable

Comme si cette abondance ne suffisait pas, les plus cinéphiles ont pu constater que les Berlinois ne rechignaient pas à redécouvrir le passé un peu oublié du cinéma de la République de Weimar, qui, il y a un siècle, avait précédé l’avènement du nazisme. Accompagnée de l’édition d’un livre-catalogue (malheureusement seulement en Allemand), la rétrospective du Festival permit de découvrir dans divers cinémas de la ville des copies restaurées de comédies comme L’aventure de Théa Rolland, amusante pochade de 1932 dont Lil Dagover était la vedette (ci-contre), Crise, du grand Wilhem Pabst de 1928, le célèbre La Lumière Bleue, de et avec Leni Riefenstahl, et bien d’autres encore. La rétrospective méritait sans doute à elle seule le voyage pour un amateur d’histoire du cinéma. Non seulement devenu le premier des quatre grands rendez-vous de l’année de la profession cinématographique mondiale, avec Cannes, Venise et Toronto, la Berlinale a donc aussi été en 2018 une étape majeure de la cinéphilie !

Philippe J. Maarek

Les 48H de la Pige 2018 les 28 et 29 juin

Les 48H de la Pige 2018 les 28 et 29 juin auront lieu à Bordeaux. L’événement, organisé par l’association Profession : Pigiste, réunit chaque année plus de 200 journalistes pigistes pour deux jours d’échanges, conférences, débats et ateliers pratiques autour de la profession.

Cette année, les 48H de la Pige, bénéficiant du soutien du Club de la presse de Bordeaux, se tiendront dans les locaux de l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA) et auront pour thème « Osons, soyons créatifs ». On y organisera également un « tremplin », c’es-à-dire l’achat ferme d’un article/reportage sur sélection de synopsis.

Le programme complet est en ligne sur https://48h.pigiste.org/

Soutien au cinéma indépendant « La Clef » à Paris

Alors que les exploitants du cinéma indépendant « La Clef » à Paris, bien connu comme une des meilleures salles d’art et d’essai de la ville, sont d’accord pour racheter leurs locaux, le propriétaire des murs refuse d’honorer sa parole et ne veut plus le leur vendre. Il s’agit pourtant du comité d’entreprise de la Caisse d’Épargne de l’Ile de France, principalement constitué de représentants syndicaux de SUD et de la CGT!

Ce comité d’entreprise menace d’expulser le cinéma dès le 31 mars 2018, alors que la somme demandée avait pourtant été rassemblée par le cinéma en fonction semble-t-il d’un accord verbal que le loueur ne veut plus honorer.

L’Union des Journalistes de Cinéma appelle à signer la pétition qui est en ligne pour soutenir ce cinéma, avec tous les détails, à :

https://secure.avaaz.org/fr/petition/Comite_dEntreprise_de_la_Caisse_dEpargne_dIle_de_France_Sauvons_le_Cinema_La_Clef_a_Paris_menace_de_fermeture_definitive/

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